Professeur des écoles et musicien, il partage un projet de création sonore autour du conte et des paysages sonores. Je lui laisse la parole !
Il y a quelques années, je prenais un poste de direction d’école élémentaire, une grande école. Il me vint une idée saugrenue : lancer un projet qui rassemblerait l’école autour de l’éducation musicale. Un projet qui permettrait de la transversalité autour de créations musicales à la portée des enfants.
Premier pas de cette danse pédagogique : trouver l’idée qui ferait consensus. Je la trouvai dans la notion de paysage musical, ou paysage sonore, comme un compositeur le disait au Canada (Schafer, 1973). Les travaux quotidiens des classes, quels qu’ils fussent, se marièrent à merveille à cette idée.
Deuxième pas : de l’écoute à la manipulation. Nous étions en période 4, la période entre les vacances d’hiver et celles de printemps. Beaucoup de beaux progrès avaient éclos et de belles activités mises en place. Dans une classe de cycle 2, l’idée était d’illustrer un conte étudié en classe. « Qu’entendez-vous lorsque le personnage traverse tel lieu ? » Et nous mettions les élèves à l’écoute de sons. Une écoute pour comprendre, pie ressentir, pour exprimer. Puis, de sons en bruits, l’écoute devint mécaniquement une envie irrésistible de produire. Face à une montagne d’objets familiers (bâtons, sacs, bouteilles, feuilles, cordes, chaînes… de nombreux objets), les enfants emplis d’écoutes variées se mirent à explorer avec plaisir, à manipuler des concepts musicaux.
Troisième pas : essayer, analyser et enfin… enregistrer. Enfin ? Pas vraiment. L’enregistrement marqua un nouveau début. D’un son qui plaisait, l’enregistrement le modelait en objet d’apprentissage. Ce n’était pas la production en tant que telle mais les compétences spécifiques que chaque enseignant voulait faire travailler qui en étaient grandis. Un des enseignants de cycle 3 finissait une séquence de géographie avec des études de paysages divers. « Quels sons vous rappellent la mare du paysage d’hier ? Quels bruits illustrent les panoramas de la ville que nous avons étudiée ? » Il était question de créer, d’inventer. Tantôt les élèves assemblaient des sons superposés (toujours avec le matériau multiples d’objets simples), tantôt il les enregistraient l’un après l’autre à la manière d’une piste que l’on remontait avec les oreilles.
Quatrième pas : publier et échanger. Pour cette étape, un (vrai) compositeur (Benoit Fremaux) vint à notre rescousse. Il nous expliqua son quotidien. Il nous apporta la technique finale qui nous manquait, la précision dans les fréquences et la compréhension de toutes ces vibrations qui est hors programme des élèves de l’école primaire. Mais puisque nous voulions publier, autant le faire bien. Et les élèves des autres classes purent ainsi écouter à leur tour, décrire, manipuler, reproduire et créer aussi. Car je le disais en amont et cela sera ma conclusion : il y a quelques années me vint une idée saugrenue… L’éducation musicale peut être un ciment pour un projet transdisciplinaire qui crée du lien.
E. Quatrefages
Voici la production :